Comme point d’orgue à la première saison de ballet de Sidi Larbi Cherkaoui, TRACES est à la fois un rite de mémoire et une célébration du présent, toujours en route et en mouvement. Artiste associé au Ballet du Grand Théâtre, Damien Jalet présentera THR(O)UGH, le binôme de SKID, vu en ouverture de saison. Fasciné par les rituels, les états de danger, et la gravité comme dimension de liaison dans tous ces phénomènes, Damien Jalet et le plasticien new-yorkais Jim Hodges ont fait une pièce où un énorme objet cylindrique, à l’image d’un tunnel ou d’un passage entre naturel et surnaturel, invite les danseurs à interagir avec lui. Ce projet a été catalysé par l’expérience personnelle de Damien Jalet comme témoin et survivant des attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Pour traiter les images non effaçables de ces atrocités et apaiser un esprit brisé, le tunnel de THR(O)UGH amène le souvenir le plus sombre de la vie du chorégraphe dans une autre lumière. La musique de Christian Fennesz influence la corporalité des danseurs de ce chaos, entre mannequins de crash-test et fantômes. Virtuoses, aléatoires, incandescents, toujours à la limite du contrôle et du déraillement, leurs vêtements (Jean-Paul Lespagnard) témoignent des expériences intenses de leur vécu collectif. THR(O)UGH porte les traces du moment de danger imprévu, ce moment précis où le temps et le lieu déterminent notre avenir. Danseur, chorégraphe et pédagogue de la danse, Fouad Boussouf, né au Maroc, arrive en France à 7 ans. Jeune danseur, il se lance à corps perdu dans la danse hip-hop, le modern jazz et le nouveau cirque, tout en décrochant un master en sciences sociales à Paris XII. Son hommage à Oum Kalthoum, la légendaire diva de la chanson arabe, OÜM, a fait sensation à la biennale de la danse à Lyon en septembre 2021. Depuis janvier 2022, Fouad Boussouf dirige le Centre chorégraphique national du Havre. Fouad Boussouf amène avec lui le plasticien suisse très en vue Ugo Rondinone, sculpteur de la démesure à la palette psychédélique et complice d’une pièce de vidéo-danse, Burn to Shine, en 2020. Pour VÏA, Boussouf et Rondinone imaginent un plateau lumineux aux tonalités chaudes comme l’asphalte sous le soleil, où la danse est ramenée à son point d’origine, le sol. Cette origine, pour Fouad, c’est aussi la terre africaine, la street et les voies de la danse hip-hop, le chemin urbain que l’on frappe, contre lequel on rebondit, pas nécessairement haut, mais fort. Jusqu’à la transe, où le corps fatigué de laisser sa trace, s’écrase, s’arrondit et s’évapore. VÏA est une présence de tous les instants, où il n’y a pas de vraie ou de fausse piste mais de la justesse, voire de la justice.

Ballet du Grand Théâtre de Genève.