Les Leçons de ténèbres sont un ancien genre musical liturgique qui se lamente sur la chute de Jérusalem. Ce sont des polyphonies vocales du XVIIème siècle. Les leçons de Betty Tchomanga pleurent, elles, la destruction de la planète : une lamentation ancrée dans les intuitions de Malcolm Ferdinand et de son essais Une écologie décoloniale. Notamment l’image du bateau négrier comme métaphore de l’histoire de la Terre. La pièce se nourrit aussi du mythe de Mami Wata et du vaudou, ce système de croyances articulant les quatre éléments – terre, eau, air et feu – ainsi que l’opposition lumière/obscurité. Traceurs du monde, quatre corps connectés à l’histoire coloniale font ici lever des visions. Des métamorphoses. Des vibrations. Ces figures courbées déterrent les récits qu’on ne voudrait pas voir, qu’on voudrait oublier. Elles sont portées par un vortex musical puisant aussi bien chez Jimi Hendrix, Kali Malone, Kae Tempest ou Curtis Mayfield que chez Couperin. Et placées dans un dispositif quadrifrontal qui fusionne le cercle du vaudou avec la rampe du théâtre occidental.
Création 2022 / première suisse